Aujourd'hui, les entretiens pour les 11 candidats au poste de président de la Fed commencent, comment Trump fera-t-il son choix ?

Début septembre, la carte des personnels et des pouvoirs de la Fed continue d’évoluer rapidement.

Le 3 septembre, selon des rapports, la Maison Blanche a clairement indiqué qu'elle finaliserait au plus vite le choix du prochain président de la Fed. Le secrétaire au Trésor, Scott Besant, a lancé le processus d'entretien avec 11 candidats, une série d'entretiens débutant ce vendredi et se poursuivant pendant une semaine.

Parallèlement, les mouvements de personnel et de pouvoir autour d'une « transition en douceur » se multiplient. D'une part, Trump a précédemment démis de ses fonctions le directeur du Bureau of Labor Statistics (BLS), suscitant des inquiétudes sur l'indépendance des données officielles. D'autre part, la gouverneure de la Fed, Adriana Kugler, a officiellement présenté sa démission début août, laissant une place vacante pour un nouveau membre. Le nouveau gouverneur de la Fed, ancien président du Council of Economic Advisers (CEA) de la Maison Blanche, Stephen Miran, a été nommé par Trump et a participé à une audition devant la commission bancaire du Sénat le 4 septembre, heure locale. Dans son témoignage écrit, Miran a souligné « l'indépendance de la politique monétaire » et a affirmé que « préserver l'indépendance » serait au cœur de sa confirmation, le public s'attendant à une avancée rapide du processus.

Avec la multiplication des actions, le marché est plongé dans l’incertitude : qui sera le prochain président de la Fed devient le centre de toutes les attentions ?

Qui sont les 11 candidats à la présidence de la Fed ?

Selon les règles de nomination de la Fed, le président doit être un gouverneur en exercice. Le mandat de président de Jerome Powell se termine en mai 2026, tandis que son mandat de gouverneur court jusqu'en janvier 2028. S'il choisit de rester gouverneur après la fin de son mandat de président, la liste des candidats potentiels pour Trump lors de la prochaine nomination sera limitée. Actuellement, la liste des 11 principaux candidats couvre des élites issues de divers milieux : « establishment de la Fed + anciens responsables + praticiens de Wall Street ».

Christopher Waller

Christopher Waller est l'ancien directeur de la recherche de la Fed de Saint-Louis, doté d'une solide expérience académique et pratique en politique monétaire. Les initiés et les marchés de prédiction le considèrent comme le favori. Il est connu pour son style « axé sur les données mais relativement flexible », a récemment soutenu une baisse rapide des taux et penche pour un changement de cap plus précoce dès que les pressions inflationnistes s’atténuent. Ses discours sur les stablecoins sont clairs et cohérents, prônant une innovation menée par le secteur privé dans un cadre législatif et de supervision des réserves.

Il a également été nommé gouverneur par Trump lors de son premier mandat. Ce gouverneur « familier des règles, de tendance dovish » pourrait être le successeur en qui Trump a le plus confiance.

Michelle Bowman

La vice-présidente à la supervision, Michelle Bowman, est considérée comme la représentante des « régulateurs hawkish ». L'une des plus jeunes membres du Conseil des gouverneurs de la Fed, elle est aussi la femme la plus ferme du camp hawkish.

En août de cette année, elle a proposé d'autoriser les employés de la Fed à détenir une petite quantité d'actifs cryptographiques afin d'améliorer leur compréhension de la supervision, envoyant un signal plus « technologiquement neutre » que par le passé sur la régulation, mais mettant davantage l'accent sur la stabilité des prix dans la politique monétaire.

Philip Jefferson

Philip Jefferson, 63 ans, actuel vice-président de la Fed, est également l'un des favoris. Il possède une solide expérience académique et en coordination organisationnelle, connaît bien le fonctionnement quotidien de la Fed et représente le camp « prudent ». Il est considéré comme l'un des candidats assurant la continuité du cadre existant, étant prudent dans l’arbitrage entre emploi et inflation.

À noter que s'il est élu, il deviendra le premier président afro-américain de la Fed.

Lorie Logan

Lorie Logan, ancienne présidente de la Fed de Dallas, a longtemps été responsable des opérations de marché ouvert à la Fed de New York. Avec 23 ans d'expérience à la Fed de New York, elle excelle dans les « tactiques de marché » et la gestion de crise. Elle a bien géré la crise financière de 2008 et la pandémie de 2020. Elle est considérée comme la banquière centrale « la plus compétente en trading ».

Kevin Warsh

Kevin Warsh, ancien gouverneur de la Fed, est un candidat doté à la fois d'une expérience des cycles de crise et d'une vision réformatrice. Gendre de l’héritière d’Estée Lauder, il est devenu à 35 ans le plus jeune gouverneur de l’histoire de la Fed. Après avoir quitté la Fed, il a travaillé à la Hoover Institution de Stanford sur la réforme de la politique monétaire.

Ses réseaux à Washington et à Wall Street sont également considérés comme un atout, ce qui en faisait déjà un favori lors du précédent renouvellement en 2017.

James Bullard

James Bullard, ancien président de la Fed de Saint-Louis, est réputé pour sa capacité à « anticiper les tournants de l’inflation ». Il communique efficacement avec le monde académique et les marchés. Dès 2021, il a mis en garde contre les risques inflationnistes, mais en raison de son indépendance d’esprit et de ses opinions, il a souvent eu un historique de vote « atypique » au sein du FOMC.

Kevin Hassett

Kevin Hassett, directeur du National Economic Council à la Maison Blanche, entretient des liens étroits avec le président Trump. En raison de sa position, il analyse presque quotidiennement les données économiques pour Trump, qui l’a même qualifié de son « professeur d’économie ».

Leurs visions politiques sont alignées, faisant de lui un candidat à la « confiance politique » très élevée. Son point faible est le manque d'expérience au sein d'une banque centrale.

Marc Sumerlin

Marc Sumerlin a fait partie de l'équipe économique de l'ère Bush fils, en tant que vice-directeur du National Economic Council. Il a proposé le plan de réforme de la Fed le plus radical, prônant une « refonte des processus » du FOMC tant sur le plan de la communication que de l'institution, se positionnant comme un « réformateur au sein de l’establishment ».

Larry Lindsey

Larry Lindsey a une expérience bipartisane, ayant été conseiller économique en chef du président Bush fils et gouverneur de la Fed sous Clinton. Il excelle dans la coordination des politiques entre la Maison Blanche, la banque centrale et les marchés, et a prédit avec précision l’éclatement de la bulle Internet. Mais à 70 ans, le marché s’interroge sur sa capacité à suivre les outils modernes de politique monétaire.

David Zervos

David Zervos, stratège en chef des marchés chez Jefferies, appartient au « front des marchés », connu pour son style direct, ses commentaires incisifs et sa vision stratégique unique. Il a un flair aigu pour le marché et des liens étroits avec la Fed, ayant travaillé à la Fed de New York dans les années 90.

Rick Rieder

Rick Rieder, Chief Investment Officer Global Fixed Income chez BlackRock, est probablement le candidat ayant la plus grande expérience de gestion d’actifs en situation réelle, supervisant plus de 4 000 milliards de dollars d’actifs chez BlackRock, ayant traversé de nombreux cycles de crise économique.

Ces derniers mois, il s’est montré nettement plus favorable à « l’assouplissement et à la reprise de l’appétit pour le risque » dans ses déclarations publiques. S’il devient « décideur », la transférabilité de son expérience de marché à la politique et les éventuels conflits d’intérêts seront mis à l’épreuve, le marché s’inquiétant aussi des conflits potentiels entre gestion de fonds et élaboration de politique.

Trois candidats favorables aux cryptomonnaies ?

Parmi eux, Christopher Waller, le favori, est aussi celui qui a la position la plus systématique sur les scénarios d’utilisation « crypto-actifs — stablecoins — innovation des paiements ».

Waller a toujours eu une approche froide, presque sévère, envers les crypto-actifs. Il a comparé la plupart des cryptomonnaies à des « cartes de baseball » — sans valeur intrinsèque, leur prix dépendant d’un équilibre fragile entre émotion et confiance. Pour ces actifs hautement spéculatifs et volatils, il insiste sur le fait que « le marché doit assumer ses propres pertes », sans que les contribuables aient à payer pour les échecs d’investissement.

Sur les stablecoins, Waller a montré un autre visage. Dès 2021, alors que les stablecoins n’étaient encore qu’un accessoire des crypto-actifs, il en a perçu le potentiel. Il a souligné à plusieurs reprises que « les stablecoins peuvent améliorer l’efficacité des paiements, introduire la concurrence et la rapidité internationales », à condition que le Congrès légifère et établisse des règles de réserve et de garde suffisantes et transparentes. Dans de nombreux discours en 2024 et 2025, il a exhorté le Congrès à légiférer pour prévenir les paniques bancaires et les interruptions de systèmes de paiement, afin que les stablecoins deviennent de véritables « dollars synthétiques » sûrs.

Waller a toujours soutenu que l’innovation doit être menée par le secteur privé, le rôle du gouvernement étant de « construire l’autoroute » — des infrastructures de compensation comme FedNow sont la voie, mais ce sont les forces du marché qui doivent faire avancer les véhicules. Il met aussi en garde : sans supervision, les institutions de paiement non bancaires et les plateformes décentralisées pourraient accumuler de l’effet de levier, créer des bulles et menacer la stabilité financière.

Rick Rieder et David Zervos, quant à eux, se distinguent de Waller : au-delà de l’aide théorique et politique, ils ont des liens concrets avec l’industrie crypto. Rick Rieder intervient surtout via les fonds qu’il gère et ses activités sectorielles. En tant que CIO Global Fixed Income chez BlackRock, il a participé à des projets avec Circle, Bullish, etc., et a soutenu des initiatives autour des stablecoins et du crédit crypto via BlackRock. Selon des documents publics, il a aussi participé à plusieurs événements de marché primaire ou secondaire liés à des plateformes d’échange crypto, des émetteurs de stablecoins et des prêteurs crypto.

David Zervos a, lui, participé et soutenu activement plusieurs projets liés aux cryptomonnaies. Il a des liens d’investissement ou de soutien avec eToro (plateforme d’échange), Circle Internet Group (émetteur de l’USDC), Bullish (bourse crypto soutenue par Peter Thiel, Alan Howard, etc.) et Figure Technology Solutions (plateforme de prêts crypto-collatéralisés). Il a également soutenu dès le début le plan d’achat de bitcoin de MicroStrategy, contribuant ainsi indirectement à l’adoption du bitcoin par les entreprises.

En résumé, Waller représente la « bienveillance institutionnelle » au sein de la Fed, tandis que Zervos et Rieder incarnent la « bienveillance du capital » venue de Wall Street. Si l’un d’eux devient président, la politique de la Fed pourrait évoluer vers un double moteur « assouplissement monétaire + institutionnalisation des cryptos », offrant une trajectoire de croissance plus claire au marché crypto réglementé.

Conclusion

En examinant cette liste de candidats issus des milieux académique, politique et économique, on constate que le choix du prochain président de la Fed ne concerne pas seulement le rythme de la politique monétaire, mais touche directement à l’orientation institutionnelle des marchés financiers mondiaux et de l’industrie crypto. Pour le marché, chaque candidat incarne une direction différente pour l’avenir.

Les observateurs rappellent également que la fréquence élevée des nominations et des mouvements de personnel par Trump alimente les inquiétudes sur l’indépendance de la Fed. Si le nouveau président est perçu comme une extension « politisée », cela pourrait accélérer à court terme l’assouplissement et la prise de risque, mais aussi accroître la volatilité à moyen et long terme des actifs en dollars et de la crédibilité institutionnelle.

Pour l’industrie crypto, peu importe qui sera finalement nommé, le véritable avantage ne réside pas dans l’« étiquette de bienveillance », mais dans la capacité à concrétiser une trajectoire d’institutionnalisation. La législation sur les stablecoins, l’intégration bancaire et la définition des frontières des paiements décentralisés seront les clés pour que le secteur bénéficie durablement des politiques.

En d’autres termes, l’arrivée du nouveau président n’est peut-être qu’un prélude : le marché doit surtout surveiller si les institutions progressent réellement vers la conformité et la transparence.